Faire son eau de vie de mirabelle maison

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Difficulté:

Il y a quelques semaines de cela, nous avons mis les voiles vers Norroy-le-Sec, trou du cul du monde jolie petite bourgade paumée de la Meurthe et Moselle, 400 habitants au garrot et en l’occurrence – lieu de résidence de beau-papa et belle-maman partis faire leur retraite annuelle à Colmar – pour nous adonner à une activité importante et gratifiante : ramasser des mirabelles en vue d’en faire de l’eau de vie maison (que nous ne distillerons pas nous-même – je précise, au cas où une taupe de la police aurait l’idée saugrenue de venir consulter ce tuto – Pour celles et ceux qui ne savent pas, la distillation d’alcool est très encadrée et on risque très gros si on se fait prendre à jouer l’apprenti sorcier…Et comme je ne tiens pas vraiment à finir en taule…).

J’en avais déjà parlé et j’avais promis de vous donner ma recette. Enfin « ma recette », disons celle du chef des opérations, que nous nommerons « Ludo Woodstock » ou « L’inspecteur des travaux finis » ou encore « Vieille mouette grincheuse » (hé hé m’en fous, je peux lui refaire le portrait, il a déjà décroché depuis longtemps dans la lecture de ce tuto). En avant pour les 10 étapes qui feront de vous le roi ou la reine des fins de soirées (parce qu’il va de soi qu’on ne sort pas une bouteille de goutte de derrière les fagots après avoir consommé de l’eau pétillante toute la journée). Bref, c’est « ti-par ».

Matériel :

Budget : Non défini

Etape 1 : Etranges acquisitions

Primo, il faut acheter des tonneaux – hé hé, ça va de soi ! Vous pouvez en trouver un peu partout : chez Gamm’Vert, chez Castoche, chez Botanic, et cetera et cetera, vous êtes grands, je vous laisse chercher.

Etape 2 : Petite cueillette

Si vous ramassez vos propres mirabelles, ne les cueillez pas directement sur l’arbre. Si elles ne tombent pas d’elles-mêmes, c’est signe qu’elles ne sont pas encore arrivées à maturité. Votre eau de vie risque de manquer de sucre. Ludo a pratiqué la technique du râteau : il a coincé l’outil dans l’arbre et a secoué avec une vigueur modérée (c’est officiel, je suis écroulée de rire ! J’ai vraiment un esprit pervers hein ?). On ne vous demande pas de maltraiter votre pauvre arbre, si ça tombe pas, ben ça tombe pas ! C’est comme quand vous avez besoin d’un papier important à la préfecture, « revenez demain » – rhooooo la mauvaise langue !

Etape 3 : Précisions sur l'oxydation

L’idéal est d’avoir assez de mirabelles pour remplir votre tonneau en une seule fois. Ludo a fait un stage sur les bases de la distillation il y a à peu près 2 ans et c’est ce qui lui a été conseillé. Si vous remplissez la moitié de votre tonneau – un jour donné, peu importe, le mercredi si ça vous fait plaisir – les fruits auront le temps de commencer à s’oxyder jusqu’au lendemain. Au moment de remplir le reste du tonneau avec des mirabelles fraiches, vous aurez une différence d’oxydation avec celles de la veille, ce qui nuira au résultat final. D’où l’importance de bien choisir son tonneau. Cette année, nous avons opté pour 2 barils de 30 litres. Nous les avons remplis tous les deux avec un seul arbre bien chargé en fruits. Je précise quand même qu’il ne faut pas blinder votre tonneau, laissez un peu d’espace, je dirais 5-10 cm de profondeur. Il faut que ça respire ma bonne dame !!

Etape 4 : Ecrasez-moi tout ça !

Si vous voulez mettre toutes les chances de votre côté, il vaut mieux écraser les mirabelles avant que la fermentation ne démarre. Alors là, c’est parti pour le gros fantasme enfantin, on met ses mains dans le tonneau et on écrase tout dans la joie. Mon beau-père préfère les écraser avec un bastaing en bois, mais perso, je n’aime pas trop, ça fait éclater les noyaux, ce qui donne un goût amer. Avec Ludo, on se retrousse nos manches et on malaxe (amis du triple sens bonjour – ça fait très club libertin tout ça ^^ C’est hyper sensuel la fabrication de l’eau de vie !). Ça prend un peu de temps mais on sent la différence. Vous faites sortir le sucre des fruits, et vous gagnerez en douceur au final.

Etape 5 : Denoyautez...Ou pas !

Dénoyautez les mirabelles si ça vous chante, mais perso, très peu pour nous. C’est déjà assez chiant de tout ramasser et malaxer, alors si en plus, faut se taper des après-midis entiers à enlever les noyaux un par un, non merci ! Les anciens – tels des Panoramix des temps modernes qui te donnent l’impression de te transmettre un savoir de la plus haute importance – nous ont maintes fois conseillé de dénoyauter puis d’ajouter une poignée de noyaux dans le mélange final (la définition même du productivisme…). Donc je vous donne le tuyau, vous en faites ce que vous voulez, mais encore une fois, très peu pour moi !

Etape 6 : Laissez la magie opérer !

Vous fermez grossièrement votre tonneau (pas la peine de serrer comme un malade, il faut que la préparation respire pour fermenter correctement) et vous laissez la magie opérer. Quand votre mélange aura totalement arrêté de « buller », c’est que la fermentation est terminée. Vous pouvez alors fermer hermétiquement votre tonneau avec l’option « serré comme un bœuf « + bague de serrage en métal. Vous pouvez garder vos tonneaux ainsi pendant quelques mois en attendant de les faire distiller (ce qui se fait en général entre la fin et le début de l’année – à vous de vous renseigner sur les pratiques en vigueur dans votre région).

Etape 7 : Renseignez-vous sur les distillateurs

Renseignez-vous sur les distillateurs. Je ne vous apprends surement rien en vous disant que certains bossent comme des vrais schmirlaps (tu ne comprends pas ? Ben t’avais qu’à habiter en Lorraine gros !). Pour vous la faire courte, il faut retirer la tête et la queue de distillation (l’alcool qui coule en premier et en dernier) lors du processus. On ne garde que le coeur. Il faut absolument jeter le reste : c’est du mauvais alcool. C’est ce qui va vous donner cette sensation de « brûlé » ou un goût de colle UHU en bouche quand vous allez déguster votre eau de vie (on est bien d’accord que ce n’est pas vraiment le but recherché, mis à part si vous voulez revivre votre jeunesse, quand vous vous enfiliez des shoots de colle à l’amande à l’aide de la petite pelle prévue à cette effet – Ahhhh la colle Cléopâtre…Nostalgie…). Malheureusement, certains préfèrent le rendement et/ou sont incompétents…Il est donc impératif de mener votre petite enquête auprès de personnes qui ont déjà fait distiller de l’alcool. Notre distillateur est à Murville (dans le 54) et il travaille plutôt correctement.

Etape 8 : Histoire de degrés

Ne faites pas distiller votre mirabelle à 50°. Par pitié. C’était THE grand débat avec les copains il y a 4 ans, quand nous avons fait distiller la bien-nommée « mirabelle de la discorde » – conseil d’amie, ne vous mettez jamais à plus de 2 pour mettre ce genre de projet en place ou c’est des histoires sans fin assurées ! Il y a donc 2 écoles : ceux que la distillation à 50° parce que « c’est comme ça que les vieux faisaient » et ceux de la distillation à 45° parce qu’on « sent plus le goût du fruit ». Rahhhh, ces perpétuelles références aux anciens qui seraient les détenteurs du savoir universel…Je vais vous dire une chose, les vieux, ils étaient pas là pour tondre la pelouse: ils distillaient la goutte juste pour se mettre minables à coup de tord-boyaux, pas pour apprécier le doux parfum de la mirabelle. A 50°, ça pique la gorge. A 45°, c’est fruité comme il faut.

Etape 9 : Petites précisions sur le vieillissement

La mirabelle ne vieillit pas, inutile de la garder 30 ans !!!! Autre grand débat avec les copains, qui conservent leur eau de vie pendant 20 ans et qui la ressortent comme une grande bouteille de vin classée en se la racontant grave. « Ouai, mais t’as vu, elle a pris une belle couleur jaune, c’est signe qu’elle a bien vieilli ». Non, Non, Non et encore Non. Légende urbaine. Si votre mirabelle vire au jaune, ce n’est pas parce que vous avez en votre possession un cru exceptionnel qui va rouler sous le palais. Je vais casser un gros mythe: si votre liquide jaunit, c’est juste à cause de l’exposition à la lumière…Faites le test avec 2 bouteilles : une que vous gardez dans un placard et une que vous laissez en dehors. Le résultat sera sans appel (votre déception aussi, je sais…). Pour vous expliquer les choses très concrètement, quand le distillateur sort votre mirabelle, c’est du pur alcool de désinfection qui débouche les chiottes (qui fait à peu près 90°). Il va alors réduire le mélange avec de l’eau, afin d’atteindre le degré souhaité (50° pour les ploucs, 45° pour les stars de cinéma si vous avez bien suivi). Une fois que le degré a été réduit avec de l’eau, votre mélange ne bougera plus jamais. Il n’y aura pas « d’effet vieillissement ». Si vous voulez faire vieillir votre eau de vie, il faut demander au distillateur de ne pas ajouter d’eau. Vous pouvez alors la conserver dans un récipient hermétique et l’oublier quelques années, tranquillou bilou. C’est ce qu’on compte faire cette année. Je vous dirai ce qu’il en est.

Etape 10 : Soyez mo-dé-ré.e.s !

A consommer avec modération ! Les Lorrains le savent mieux que personne : la mirabelle, ça tape au crâne. De quoi se ramasser une gueule de bois monumentale et/ou de rouler sous la table en fin de soirée (ou de ne pas réussir à monter des escaliers pour aller se vautrer sur un lit – ouuuuuuuuh dossier !!!! Je précise quand même qu’il ne s’agit ni de Ludo ni de moi – j’emporterai le nom de la personne concernée dans la tombe, c’est promis Kevin ! ^^ ). N’hésitez surtout pas à utiliser l’eau de vie de mirabelle dans vos desserts (les enfants dorment bien après !) et en cuisine (pour un poulet flambé par exemple). 

Et vous, chers lecteurs, avez-vous déjà fait distiller votre propre eau de vie ? Avez-vous de précieux conseils à nous faire partager ? Quelque chose à dire sur la météo du Canada ou toute autre chose sans rapport ? J’attends vos commentaires comme le foie d’un alcoolique attend son pastis café au lait, je brûle d’impatience.

Sources :

https://manonwoodstock.wordpress.com/


Bravo pour votre contribution au maintien d'un bon cadre de vie !

Je ne suis pas lorrain, mais voisin ( franc comtois ). J'espère que vous n'en serai pas "vexé", mais je rajouterais bien qu'il est important de vérifier que le distillateur fait bien "la repasse". A votre santé ! JDE 

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